La pauvreté des enfants et des familles : un choix politique, pas une fatalité

28.04.25

Make Mothers Matter, dans une déclaration conjointe de l'Alliance de l'UE pour l'investissement dans l'enfance, appelle à une Europe qui protège chaque enfant, en alignant les politiques et le budget de l'UE sur l'objectif d'éradication de la pauvreté infantile.

La pauvreté infantile constitue une crise en expansion en Europe, touchant 20 millions d’enfants (24,8 %), soit bien plus que les adultes (20,6 %). Malgré les efforts en cours, des défaillances systémiques ont permis à la pauvreté de persister et de s’aggraver, avec de lourdes conséquences économiques, sociales et sanitaires pour les individus comme pour les sociétés. Il ne s’agit pas seulement d’un enjeu moral, mais aussi économique : son coût est estimé à 3,4 % du PIB dans les pays de l’OCDE.

La persistance de la pauvreté des enfants révèle une défaillance collective et systémique, aux conséquences graves sur les plans socio-économique, sanitaire, budgétaire et sécuritaire. Elle dépasse les seules questions d’éducation et d’emploi : la pauvreté est l’un des principaux facteurs de séparation familiale, menant à des placements en foyers qui aggravent encore les perspectives des enfants et perpétuent le cycle de la pauvreté.

Principaux constats

  • Hausse de la pauvreté infantile : entre 2019 et 2023, le nombre d’enfants en situation de risque est passé de 19 à près de 20 millions, en raison du COVID-19, de la crise du coût de la vie et du changement climatique.
  • Creusement des inégalités : les enfants roms, migrants, en situation de handicap ou placés en foyers font face à une exclusion systémique accrue.
  • Géographie inégale : la pauvreté infantile est significative même dans les zones riches, où les aides sociales peinent à atteindre les plus vulnérables.
  • Sous-investissement : malgré le rendement élevé des interventions précoces, les choix politiques se concentrent sur la relance à court terme plutôt que sur l’investissement social à long terme.

Opportunités politiques

L’UE dispose aujourd’hui d’outils pour impulser un changement structurel :

  • Garantie européenne pour l’enfance : garantir l’accès aux services essentiels pour les enfants vulnérables.
  • Socle européen des droits sociaux (SEDS) révisé et stratégie anti-pauvreté de l’UE : faire de la lutte contre la pauvreté des enfants et des familles une priorité.
  • Cadre financier pluriannuel (CFP) : mobiliser un financement européen pour des solutions innovantes que les budgets nationaux ne peuvent soutenir seuls.

La Garantie européenne pour l’Enfance : un outil déterminant

Cette initiative vise à briser le cycle de la pauvreté et de l’exclusion sociale des enfants en assurant l’accès à des services essentiels : éducation, santé, logement, alimentation. Elle combine approche préventive et mesures concrètes contre les inégalités structurelles.

La Garantie européenne pour l’Enfance constitue une opportunité historique d’agir contre la pauvreté des enfants et des familles. En adoptant la Recommandation relative à la Garantie européenne pour l’enfance, les États membres ont pris un engagement historique pour garantir l’accès à des services essentiels — tels que les soins de santé, l’éducation, le logement et une alimentation saine — aux enfants vivant dans des situations de vulnérabilité. En mettant l’accent sur ces enfants particulièrement exposés, cet instrument vise à briser le cycle de la pauvreté et à améliorer les perspectives de ceux qui sont les plus à risque d’exclusion. Cette politique a le potentiel d’agir à la fois comme un outil de prévention et d’intervention, en répondant aux besoins immédiats tout en s’attaquant aux obstacles structurels qui entretiennent l’exclusion sociale.

Des systèmes de protection sociale bien conçus sont des outils essentiels pour réduire la pauvreté des enfants, en apportant un soutien direct aux familles avec enfants. De nombreuses études démontrent les effets positifs de ces politiques, non seulement sur la diminution des taux de pauvreté infantile, mais aussi sur le renforcement de l’inclusion sociale des familles dans leur ensemble. Ces dispositifs favorisent la pleine participation des enfants et de leurs familles à la société, garantissant des chances équitables et contribuant à briser le cycle intergénérationnel de la pauvreté. Les causes profondes de la pauvreté des enfants sont traitées en assurant un soutien financier adéquat et un accès gratuit aux services essentiels et sociaux, notamment l’éducation de la petite enfance, les repas scolaires, les soins de santé et les services d’accompagnement familial. Car la pauvreté des enfants prend racine dans celle des familles.

Ces mesures sont préventives : elles permettent d’éviter que les enfants connaissent le manque, les conditions de vie inadéquates ou la séparation familiale. Un État providence équitable réduit les inégalités de revenus et amortit les chocs économiques.

 

Renforcer la mise en œuvre de la Garantie pour l’enfance

Des lacunes persistent :

  1. Plans d’action nationaux trop faibles : absence d’objectifs clairs, de données, de financements ; promesses non tenues.
  2. Exclusion de groupes vulnérables : obstacles légaux et administratifs pour les enfants de familles monoparentales, migrantes, roms, en situation de handicap ou placés.
  3. Suivi fragmenté : décalage avec les cadres nationaux de lutte contre la pauvreté.
  4. Processus de planification et d’évaluation qui se fait encore trop souvent sans la participation active de la société civile et des enfants.

Integrated EU Social Agenda to Combat Child Poverty (Vers une stratégie sociale européenne intégrée pour combattre la pauvreté infantile) : Ce document plaide pour une approche intégrée, fondée sur les droits, afin d’éradiquer la pauvreté des enfants et des familles au sein de l’Union européenne. Il met en avant l’importance de tirer parti des prochaines révisions du Plan d’action du Socle européen des Droits Sociaux (SEDS) et du lancement d’une Stratégie européenne de Lutte contre la Pauvreté, considérés comme des opportunités clés.

Recommandations principales

  • Favoriser la coordination multisectorielle (santé, éducation, logement, fiscalité, climat…) pour un changement systémique.
  • Traiter les causes structurelles (précarité du logement, inégalités éducatives, écarts salariaux) par une approche préventive et intersectionnelle.
  • Relier stratégie anti-pauvreté et Cadre Financier Pluriannuel (CFP) pour des investissements durables.
  • Intégrer la réduction de la pauvreté des enfants dans toutes les réformes sociales pertinentes de l’UE.
  • Instaurer des objectifs de financement sensibles aux besoins des enfants, avec un « indicateur enfant » pour le suivi et la transparence.
  • Garantir l’inclusion effective des groupes vulnérables en levant les obstacles à l’accès aux services.
  • Renforcer le suivi, la participation et la responsabilisation.
  • Investir dans la protection sociale comme levier d’inclusion et de lutte contre la pauvreté.
    Pour Make Mothers Matter, les parents ne sont pas de simples usagers, mais des partenaires clés du développement de l’enfant.
  • Priorité à l’intervention précoce (notamment les 1 000 premiers jours), à l’éducation, au logement et à la santé. Les recherches montrent que les investissements précoces sont les plus rentables. Le rapport 2024 de la Commission européenne (ESDE) estime à 11 milliards d’euros par an le besoin pour atteindre les objectifs en matière d’éducation et de garde des jeunes enfants.
    Pour MMM, un accueil et une éducation précoce de qualité sont vitaux pour les familles vulnérables. Ils soutiennent le développement global de l’enfant et permettent aux mères, encore majoritairement chargées du soin, de travailler ou de se former. Mais beaucoup d’enfants n’y accèdent pas, faute de financements, de reconnaissance du rôle des aidants informels ou de barrières juridiques.

Conclusion

La pauvreté des enfants a des conséquences à vie, encrant les inégalités et limitant les chances. L’UE dispose des outils, des politiques et du budget pour l’éradiquer. La pauvreté infantile est un choix politique, pas une fatalité.

Make Mothers Matter appelle l’UE à placer les enfants et leurs familles au cœur de ses priorités politiques et budgétaires, en particulier dans la stratégie anti-pauvreté, le plan d’action du SEDS et la Garantie pour l’enfance. Le temps est venu pour des engagements contraignants, pas seulement des déclarations : les enfants ont besoin d’actions, de financements et de coordination intersectorielle, maintenant.

Déclaration complète (en anglais)

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