Elle fait tout : la dévalorisation du travail de care dans les politiques européennes d’équilibre entre vie professionnelle et vie privée

28.11.25

Partout en Europe, les mères accomplissent une quantité considérable de travail de care non rémunéré, indispensable au fonctionnement des familles et des sociétés — pourtant, une grande partie de ce travail reste largement invisible dans les politiques européennes. Une nouvelle étude partagée avec Make Mothers Matter soutient que, malgré les progrès réalisés en matière de congés parentaux et de services d’accueil, les mesures européennes d’équilibre entre vie professionnelle et vie privée continuent de prioriser la croissance économique au détriment des réalités vécues par les mères.

Au cœur de la recherche se trouve une préoccupation centrale : l’égalité de genre dans l’UE est encore largement conçue comme le fait d’intégrer davantage de femmes sur le marché du travail. S’il s’agit là d’un objectif important, les approches politiques actuelles réduisent souvent le « caregiving » à un simple moyen de faciliter l’emploi, au lieu de le reconnaître comme une contribution sociale précieuse en soi. Selon l’étude, cette vision étroite ne reflète pas les réalités vécues par les mères, qui accomplissent un travail continu, qualifié et exigeant sur le plan émotionnel — éducation des enfants, organisation du foyer, gestion de la charge mentale — qui soutient les familles et rend possible toute autre activité sociale et économique.

L’analyse s’appuie sur les théories féministes et les cadres des droits humains pour montrer que cet angle d’approche néglige la valeur sociale profonde du travail de care non rémunéré, assumé de manière écrasante par les mères. Celles-ci sont souvent représentées en fonction des exigences du marché du travail, plutôt qu’en tant qu’individus avec des responsabilités et des droits de care diversifiés.

Le mémoire souligne que le caregiving n’est pas une expérience uniforme. De nombreuses mères font face à des contraintes structurelles : cultures professionnelles rigides, accès limité à des solutions de garde flexibles, pressions financières, manque de soutien institutionnel durable pour le care non rémunéré qu’elles fournissent. Ces pressions sont particulièrement fortes pour les mères seules, les mères au foyer ou les mères en emploi précaire — des groupes dont les expériences sont rarement reflétées dans les discussions au niveau européen. Ces conditions limitent leur capacité à faire de véritables choix autonomes concernant le travail, le care et la vie familiale.

 

Finally, the study calls for maternal rights that go beyond pregnancy, birth, and post-partum care. It emphasises the need for long-term recognition and support for mothers’ unpaid care work as a « social good essential to society’s functioning« .

Enfin, l’étude appelle à des droits maternels qui vont au-delà de la grossesse, de l’accouchement et des soins post-partum. Elle insiste sur la nécessité d’une reconnaissance et d’un soutien à long terme pour le travail de care non rémunéré des mères, considéré comme un « bien social essentiel au fonctionnement de la société ».

La thèse identifie plusieurs problèmes majeurs dans les approches actuelles de l’UE :

  • Représentation des mères : souvent associée à la productivité sur le marché du travail plutôt qu’aux réalités du caregiving.
  • Care et travail : le care est principalement valorisé comme un outil permettant de soutenir l’emploi, et non comme un bien public.
  • Autonomie et choix : limités par les pressions économiques et les structures professionnelles rigides.
  • Droits et soutien institutionnel : de nombreux droits dépendent du statut professionnel, du revenu ou du bon vouloir de l’employeur.
  • Angles morts politiques : les inégalités intersectionnelles qui touchent les mères sont souvent négligées.

Comme l’autrice le souligne :

« L’égalité ne devrait pas seulement signifier un accès égal au travail, au salaire ou au congé parental ; elle devrait aussi signifier que chacun, quel que soit son genre, puisse faire des choix autonomes sans être limité par des contraintes structurelles. Ce n’est qu’à cette condition que de véritables choix libres et une réelle égalité (de genre) peuvent être atteints. »

Make Mothers Matter remercie chaleureusement Amayah Togba d’avoir consacré son travail à un sujet aussi urgent et trop peu étudié, et d’avoir choisi de partager ses conclusions avec nous.

Sa thèse renforce ce que les mères savent depuis longtemps — et ce que les décideurs politiques doivent enfin reconnaître : le caregiving n’est pas une activité secondaire, mais un pilier du bien-être social et économique, et le valoriser est essentiel pour parvenir à une égalité réelle.

Amayah Togba est diplômée en droits humains de la Faculté des sciences humaines et théologiques de l’Université de Lund, en Suède.

Accéder au texte intégral de la thèse. (En anglais)

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