Solidarité intergénérationnelle pour un meilleur équilibre entre vie professionnelle, vie privée et responsabilités familiales

13.07.25

MMM a été invité à intervenir lors de la conférence annuelle d’AGE, consacrée à la contribution à la Stratégie de l’UE pour l’Equité Intergénérationnelle. L’événement a abordé plusieurs domaines clés : le marché du travail, la santé et les services de soins, le logement, la mobilité, la numérisation et le changement climatique.

Alors que l’Union européenne est confrontée à un vieillissement rapide de sa population, la proportion de personnes âgées de 65 ans et plus est passée de 16 % à 25 % en seulement deux décennies.

Ce changement démographique pose de nombreux défis : évolution de l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, demande accrue de services de soins, pression sur la cohésion sociale.

Pour y répondre, il est essentiel de mettre en place un cadre fondé sur la solidarité entre les générations, afin de promouvoir l’égalité entre tous les âges. Pour la première fois, l’UE a nommé une Commissaire spécifiquement chargée de l’équité intergénérationnelle, de la jeunesse, de la culture et du sport, avec comme priorité clé l’élaboration d’une Stratégie pour l’Equité intergénérationnelle.

Chez MMM, nous avons été heureux de participer à ces échanges, convaincus que l’Union européenne doit adopter une approche intergénérationnelle en matière d’équilibre entre vie professionnelle, vie familiale et responsabilités familiales.

La solidarité intergénérationnelle est une valeur fondamentale de l’Union européenne.

L’article 3 du Traité sur l’Union européenne affirme clairement que la solidarité entre les générations est un pilier de notre avenir commun. Bien que des avancées importantes aient été réalisées — comme la directive de 2019 sur l’Equilibre entre Vie professionnelle et Vie privée et la Stratégie européenne en matière de Soins de 2022 — des efforts supplémentaires sont nécessaires pour traduire ce principe en changements concrets et durables.

Pourquoi est-ce nécessaire ?

Répartition inégale des responsabilités de soins

Les parents, et particulièrement les mères, ont du mal à concilier emploi et responsabilités familiales. Plus d’un tiers des parents déclarent avoir des difficultés à équilibrer les deux, et beaucoup de mères réduisent leur temps de travail ou quittent leur emploi. Cela entraîne un fardeau disproportionné de travail de soins non rémunéré pour les mères, avec à la clé des désavantages économiques durables, notamment en termes de salaires et de pensions.

De nombreuses familles s’appuient sur les grands-parents, souvent faute d’alternatives, pour des raisons financières ou par manque de personnes de confiance.

Au Royaume-Uni, 40 % des grands-parents de plus de 50 ans assurent régulièrement des gardes d’enfants, et 71 % des 50–64 ans sont encore actifs. Ce soutien reste pourtant largement invisible et non soutenu.

Le coût caché de la maternité

La « pénalité de maternité » conduit à des interruptions de carrière, à des emplois à temps partiel ou mal rémunérés, et pousse souvent les femmes à renoncer à leur carrière.

Dans une enquête européenne menée par MMM auprès de plus de 10 000 mères, 55 % d’entre elles ont déclaré avoir modifié leur situation professionnelle après avoir eu un enfant, et 27 % ont indiqué que la maternité avait eu un impact négatif sur leur carrière.

Isolement social entre générations

Le vieillissement de la population accroît les risques de solitude et d’isolement, avec des conséquences importantes sur la santé physique et mentale des personnes âgées. Les recherches montrent que les personnes âgées qui restent actives — en gardant des enfants, en étant bénévoles ou en transmettant leur savoir — bénéficient d’un meilleur bien-être général. Mais le manque de soutien et la séparation structurelle entre les générations limitent ces interactions précieuses.

Lacunes dans les politiques et les structures de soutien

Les initiatives récentes de l’UE sont prometteuses, mais leur mise en œuvre reste inégale entre États membres.

Dans de nombreux pays, il n’existe pas de dispositions pour transférer les congés parentaux aux grands-parents, et le travail de soins non rémunéré reste souvent ignoré. En l’absence de cadre politique intergénérationnel clair, les familles assument seules la charge des soins, au prix de lourdes contraintes financières et émotionnelles.

Quelques exemples prometteurs

  • Suède : depuis le 1er juillet 2024, les parents peuvent transférer des jours de congé parental à d’autres personnes (grands-parents par exemple) — jusqu’à 45 jours (ou 90 pour les parents isolés), l’indemnité dépendant du revenu ou d’un montant forfaitaire pour les retraités.
  • Allemagne et Autriche : des personnes âgées se portent volontaires pour garder des enfants, en particulier quand les grands-parents ne sont pas disponibles. Ces « grands-parents de substitution » renforcent le lien intergénérationnel, comme à Bochum, où la Ligue de protection de l’enfance coordonne ces initiatives.
  • Royaume-Uni : les parents peuvent transférer leurs crédits de prestations familiales à des grands-parents ou proches s’occupant d’enfants de moins de 12 ans. 1 grand-mère sur 5 fournit au moins 10 heures de garde par semaine.
  • Portugal : les grand-parents qui travaillent peuvent bénéficier de 30 jours de congé pour s’occuper d’un enfant malade si les parents ne les utilisent pas.
  • Entreprises : certaines adoptent des politiques innovantes. L’entreprise britannique Saga offre une semaine de congé payé aux grands-parents à la naissance d’un petit-enfant.

Un exemple international nous vient du Japon, où la ville de Nagi est devenue un modèle d’intégration des personnes âgées dans la garde d’enfants. les aînés y jouent un rôle actif dans la garde d’enfants, en tant que mentors ou « grands-parents d’honneur ». Des Espaces Communautaires Intergénérationnels y ont été créés. Le résultat : un taux de natalité stable, un lien social fort et un bien-être accru pour tous.

Ces modèles doivent cependant être mis en œuvre avec prudence, pour ne pas dissuader les pères de prendre leur propre congé de paternité.

Que faut-il faire ?

  • Redéfinir le travail pour y inclure les contributions rémunérées et non rémunérées.
  • Considérer le travail de soins non rémunéré comme un service essentiel, ouvrant droit à des protections sociales.
  • Intégrer des “crédits de soins” dans les systèmes de retraite, pour éviter de pénaliser ceux qui s’occupent d’autrui.
  • Adopter un cadre politique intergénérationnel pour les soins, reflétant l’engagement de l’UE pour l’équité et la solidarité.
  • Permettre le transfert volontaire de jours de congé parental aux grands-parents, tout en reconnaissant leur contribution.
  • Promouvoir l’habitat intergénérationnel pour encourager les liens familiaux et la solidarité au quotidien.
  • Encourager les entreprises à adopter des politiques favorables à la famille, y compris le congé payé pour les grands-parents, afin qu’ils puissent aider sans compromettre leur carrière.

Nous devons dépasser la logique des silos — séparés par les âges, les rôles, les institutions et même les lieux de vie. Pour répondre aux défis sociaux et personnels d’aujourd’hui, y compris la crise croissante de santé mentale, nous devons raviver un sentiment d’appartenance partagé, qui relie les générations et valorise chaque étape de la vie. Le travail de soins est une responsabilité collective. Il mérite reconnaissance et soutien

Guide pour éviter une communication stéréotypée lorsqu’on parle du vieillissement et des personnes âgées.

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