« L’autonomisation économique des femmes est une illusion
si l’on ignore le travail non rémunéré dans les foyers »
MMM Sepúlveda, rapporteur spécial des Nations Unies
sur l’extrême pauvreté et les droits de l’homme
Le travail familial non rémunéré (le « care ») répond aux besoins de soins matériels, éducatifs et émotionnels des personnes au sein de la famille, principalement des enfants, mais aussi des personnes handicapées, malades ou âgées. Il inclut les tâches domestiques (cuisine, ménage…), mais également l’éducation des enfants et tous les soins prodigués à des proches.
Ce travail, essentiel au bien-être des individus, des communautés, et de la société, est majoritairement effectué par les femmes, plus particulièrement les mères. Globalement, elles y consacrent en moyenne 2 fois et demi plus de temps que les hommes, et jusqu’à 10 fois plus dans des pays comme l’Inde ou le Maroc.
Egalement Indispensable au bon fonctionnement de l’économie, ce travail est statistiquement invisible. Sa valeur, pourtant estimée de 10 à 39 % du PIB selon les pays, en fait un véritable secteur économique qui est ignoré des politiques.
Dans les pays en développement, la question du temps passé au travail familial non rémunéré est amplifiée : les femmes doivent souvent compenser par leur travail un manque d’infrastructures et de services publics (en particulier l’accès à l’énergie, l’eau et l’assainissement, mais également les services de santé, de transports, de télécommunications, etc.). Dans ces conditions, beaucoup n’ont pas assez de temps pour se consacrer à des activités génératrices de revenus. Les mères sont donc particulièrement vulnérables face à la pauvreté.
Le manque de temps est également une préoccupation importante pour les mères des pays développés. C’est ce qu’a montré l’enquête « Ce que les mères d’Europe veulent » réalisée en 2011 par MMM : les mères y ont exprimé leur manque de temps à consacrer à leur famille, leur besoin de reconnaissance, et leur désir d’avoir de vrais choix pour concilier leur rôle de mère avec un parcours professionnel.
La répartition inégale du travail familial non rémunéré est un obstacle majeur à la participation effective des mères dans la vie économique et politique. Alors que toujours plus de mères ont une activité professionnelle, elles sont obligées de jongler avec leurs responsabilités éducatives et domestiques. Ce déséquilibre devient ainsi un problème de santé publique. Les pères doivent être encouragés à assumer leur part de responsabilité par des mesures appropriées.
De plus, parce qu’il est considéré comme économiquement non productif, ce travail de « care » reste dévalorisé, même quand il est professionnel : tous les métiers des domaines du soin à la personne et de l’éducation, majoritairement assurés par des femmes, sont mal rémunérés.
Manquant de temps pour participer pleinement à la vie économique, les mères restent souvent enfermées dans des positions subalternes ou dépendantes ; elle peinent à s’assurer un minimum d’indépendance financière et souffrent de façon disproportionnée de la pauvreté – notamment lorsqu’elles doivent élever seules leurs enfants.
Depuis longtemps identifiée par MMM et les associations militant en faveur des droits des femmes, cette problématique du travail familial non rémunéré est jusqu’en 2013 restée dans l’ombre. Le rapport que Magdalena Sepulveda, alors rapporteur spécial de l’ONU sur la pauvreté, a présenté en octobre 2013 devant l’Assemblée générale des Nations Unies a enfin déclenché une prise de conscience. Il établit le lien entre la vulnérabilité des femmes à la pauvreté et la répartition inéquitable du travail familial non rémunéré – non seulement entre les hommes et les femmes, mais aussi entre les femmes de différentes classes sociales et économiques. Le rapport identifie également clairement le travail familial non rémunéré comme un obstacle majeur à l’autonomisation économique des femmes et à l’égalité des genres.
Grâce au travail de plaidoyer d’organisations comme MMM, l’importance de cette problématique a été reconnue par les Etats membres de l’ONU lors de l’adoption en 2015 de l’agenda 2030 et des Objectifs de Développement Durable (ODD) : une cible lui est dédiée dans l’ODD 5 consacré à l’égalité hommes femmes.
Cible 5.4 de l’agenda 2030 « Prendre en compte et valoriser les soins et travaux domestiques non rémunérés, par la mise en place de services publics, d’infrastructures et de politiques de protection sociale et par la promotion du partage des responsabilités dans le ménage et la famille, en fonction du contexte national. »
→ Rendre le travail familial non rémunéré visible auprès des politiques et de l’opinion publique. Faire des enquêtes régulières sur l’utilisation du temps, et l’inclure dans le PIB dans les statistiques du travail.
→ Donner aux mères un statut et des droits : protection sociale, formation, crédits dans le calcul des pensions de retraite, une voix dans la société.
→ Sensibiliser à la valeur de ce travail essentiel à la société et à l’économie. Il contribue au développement de la petite enfance et à l’éducation : les enfants d’aujourd’hui seront les citoyens et la force de travail de demain.
→ Investir dans des infrastructures et des services publics qui soient géographiquement et financièrement accessibles (eau, assainissement, électricité et autres types d’énergie, transport publics, services de santé, technologies de l’information et de la communication etc.).
→ Prioriser les régions les plus reculées avec l’objectif affiché de réduire la pauvreté en temps des femmes et leur charge de travail domestique non rémunéré.
→ Soutenir l’engagement des pères et promouvoir une meilleure répartition des responsabilités domestiques et parentales :
→ Placer le soin aux personnes (le « care ») au centre des priorités. Appliquer des politiques transversales cohérentes impliquant travail, éducation, santé, affaires sociales et familiales, fiscalité et condition de la femme – y compris des politiques de conciliation vie familiale/ vie professionnelle ciblant les hommes comme les femmes (voir le travail de la délégation Europe dans ce domaine).
Ces recommandations sont au cœur des actions de plaidoyer de MMM, qui continue à collecter des exemples de politiques et « bonnes pratiques » autour des « 3R ».
16.12.24
ONU, Genève - Le groupe de travail sur la discrimination à l'égard des femmes et des filles a demandé des informations sur les politiques et les programmes de soins dans le monde entier. En plus de souligne
07.10.24
ONU Genève- Alors que la 57ème session du Conseil des Droits de l'Homme (9 Septembre-11 Octobre) s'achève, revenons sur nos contributions qui apportaient la perspective des mères aux multiples discussions q
24.09.24
MMM en France - Retour sur notre dîner de haut niveau qui s'est tenu à l'hôtel de ville de Versailles, près de Paris.
21.09.24
ONU New York, Sommet du futur- Lors de l'événement Caring Territories for the Future: Feminist Municipalism for Equality, Climate Action, Democracy and Peace, MMM a présenté les nombreuses façons qu'ont au
29.07.24
ONU New York - Notre événement parallèle virtuel du HLPF a rassemblé des experts pour mettre en lumière la façon dont les différentes crises mondiales auxquelles nous sommes confrontés (en particulier l
21.07.24
ONU New York - Participant à la réunion du Conseil Economique et Social des Nations Unies (ECOSOC), relatif au systèmes de soins et de soutien, MMM réaffirme le principe de co-responsabilité qui devrait so