Briser le cycle : l’égalité des genres comme voie vers une meilleure santé mentale

18.03.25

Le Conseil de l'Union européenne a pris une mesure décisive en reconnaissant le lien vital entre l'égalité des genres et la santé mentale.

À travers ses dernières conclusions EPSCO (Emploi, Politique sociale, Santé et Consommateurs) sur le Renforcement de la santé mentale des femmes et des filles par la promotion de l’égalité des genres, le Conseil souligne l’urgente nécessité de s’attaquer aux disparités de bien-être mental fondées sur le genre. Cette initiative est un tournant, renforçant l’idée que l’égalité des genres n’est pas seulement une question d’équité—elle est essentielle pour une société plus saine et plus résiliente.

À Make Mothers Matter (MMM), nous sommes particulièrement fiers que notre rapport, Les mères célibataires en Europe, ait été parmi les références clés utilisées par le Conseil pour rédiger ces conclusions cruciales.

Les défis uniques en matière de santé mentale auxquels font face les femmes et les filles

Les problèmes de santé mentale touchent tout le monde, mais les femmes et les filles sont confrontées à des risques distincts et disproportionnés. La recherche montre systématiquement que les structures sociétales, les pressions économiques et les responsabilités liées aux soins amplifient ces défis. Selon le Cadre européen d’action de l’OMS sur la santé mentale (2021-2025), les femmes — particulièrement celles ayant des handicaps psychosociaux, intellectuels, cognitifs et neurodéveloppementaux — sont exposées à un risque accru d’exclusion sociale.

Plusieurs facteurs contribuent à cette inégalité :

  • Stress professionnel et vulnérabilité économique : Les femmes sont surreprésentées dans les emplois mal rémunérés avec un stress élevé et de mauvaises conditions de travail, entraînant épuisement et anxiété.
  • Obstacles aux soins de santé mentale : Les femmes font face à des obstacles spécifiques au genre dans l’accès à des services de santé mentale adéquats et opportuns, laissant beaucoup d’entre elles sans le soutien dont elles ont besoin.
  • Violence domestique et traumatismes : La directive européenne sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes souligne l’impact profond des abus domestiques sur la santé mentale. De plus, les enfants témoins de violence domestique présentent un risque accru de développer des problèmes de santé mentale.
  • Disparités de genre en matière de bien-être mental : Dans toute l’Europe, les enquêtes d’auto-évaluation révèlent systématiquement que les femmes déclarent des niveaux de bien-être mental inférieurs à ceux des hommes. Par exemple, les problèmes de santé mentale, y compris ceux qui contribuent aux pensées et comportements suicidaires, sont plus répandus chez les femmes.

L’écart des soins entre les genres : une crise silencieuse en santé mentale

L’un des facteurs les plus négligés de l’inégalité en santé mentale est l’écart des soins entre les genres. Les femmes, particulièrement les mères, assument la majorité du travail de soins non rémunéré ce qui limite non seulement leurs perspectives de carrière mais leur impose également une immense responsabilité psychologique.

Les données sont éloquentes :

  • Les mères célibataires présentent un risque élevé de problèmes de santé mentale en raison de l’insécurité financière, de l’isolement social et des responsabilités écrasantes. Dans l’UE, il existe 7,8 millions de familles monoparentales, dont les mères représentent près de 80%.
  • La santé mentale maternelle est un enjeu crucial. La dépression périnatale est répandue, et les 1 000 premiers jours de la vie d’un enfant sont cruciaux pour le bien-être de la mère et du bébé. Des services de garde d’enfants accessibles, des soins partagés et des modalités de travail flexibles sont essentiels.
  • Les aidants à long terme — dont la majorité sont des femmes — connaissent des problèmes de santé mentale à des taux 20% plus élevés que les non-aidants.
  • Les femmes âgées, qui vivent plus longtemps que les hommes, ont besoin d’un soutien adéquat en matière de santé mentale dans le cadre de la construction d’une « société de longévité », selon le rapport de la Commission européenne « Le changement démographique en Europe : une boîte à outils pour l’action ».
  • Les femmes et les filles handicapées comptent parmi les plus vulnérables, confrontées à des risques accrus de violence, d’isolement et de discrimination qui aggravent leur état de santé mentale.

Transformer les engagements en actions : recommandations clés pour les États membres

Pour combler l’écart entre les genres en matière de santé mentale, les États membres de l’UE doivent prendre des mesures audacieuses et efficaces :

  1. Éliminer les disparités de genre : Mettre en œuvre des politiques qui réduisent les inégalités de santé mentale fondées sur le genre en allégeant le fardeau des soins non rémunérés et en élargissant l’accès aux services de santé mentale.
  2. Améliorer l’équilibre travail-vie personnelle : Introduire des modalités de travail flexibles, améliorer l’accès à des services de garde d’enfants abordables et assurer une répartition équitable des responsabilités de soins entre hommes et femmes.
  3. Renforcer les services de santé mentale : Garantir que les mères célibataires, les aidants et les femmes en situation vulnérable aient accès à un soutien médical, social et psychologique avec un minimum d’obstacles.
  4. Renforcer l’autonomisation économique : S’attaquer aux écarts de rémunération entre les genres et aux obstacles à la progression professionnelle pour améliorer l’indépendance financière des femmes et leur résilience face aux problèmes de santé mentale.
  5. Soutenir les victimes de violence: Fournir des soins tenant compte des traumatismes et des mécanismes de protection solides pour les victimes de violence domestique et de discrimination fondée sur le genre.
  6. Promouvoir un bien-être holistique : Lancer des initiatives qui encouragent des modes de vie sains, la gestion du stress et des activités récréatives accessibles pour les femmes et les filles.
  7. Investir dans les réseaux de soutien social : Renforcer le soutien communautaire, les services de garde d’enfants de qualité et l’assistance aux aidants pour alléger la charge mentale des femmes et des mères.

Un appel au changement

La reconnaissance par le Conseil de l’Union européenne du lien profond entre l’égalité des genres et la santé mentale marque un moment charnière. En mettant en œuvre ces recommandations, les États membres ont l’opportunité de créer une société plus inclusive, solidaire et mentalement saine — une société où les femmes et les filles peuvent s’épanouir sans le poids des inégalités systémiques qui les retiennent.

Le moment est venu d’agir. La santé mentale n’est pas seulement une question personnelle — c’est une question sociétale. Une Europe égalitaire en matière de genre est une Europe plus saine pour tous.

Accès au texte complet des Conclusions

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